SIOI - Frattini: Colloque "Les eaux effervescentes de la Méditerranée: crise au Nord et soulèvement au Sud "
34ème
Moussem Culturel International d'Assilah - Université d'été Al Mouatamid Ibn
Abbad (27ème session)
Intervention du President Frattini au colloque "L'Union du Maghreb et l'avenir de la
coopération avec les pays du Nord de la Méditerranée"
Les changements démocratiques
dans les pays arabes ont crée une
nouvelle et positive dynamique politique dans le Maghreb .
Je me réfère en particulier
à:
• l’amélioration des relations entre le Maroc et l’Algérie (il y a eu
de nombreux échanges de visites entre les ministres des deux pays dans les mois
derniers) ;
• aux nouvelles relations entre la Lybie – post Ghaddafi et ses voisins ;
• à la revitalisation des initiatives de coopération régionale, parmi
lesquelles l’Union pour le Maghreb Arabe (UMA), dont une importante réunion
ministérielle a été organisée à Rabat le 18 février et dont un Sommet en
Tunisie est prévu en Octobre ; le « 5+5 » qui a été relancé avec
la réunion ministérielle de Rome (20 février ) en vue du Sommet au niveau des
Chefs de gouvernement prévu à Malte en Octobre.
Ces développements positifs ne
devraient pas nous surprendr : car l’ouverture
politique à l’intérieur des pays concernés a permis l’établissement d’un climat
politique plus amicale entre eux et a donc crée les conditions pour donner
une nouvelle impulsion à la coopération et à l’intégration régionale.
Bien
entendu, le changement de l’architecture régionale présente plusieurs défis. Il faut surtout
mesurer ces perspectives régionales avec le fait que l’évolution politique dans
chaque pays de la région est encore loin d’être réellement consolidée. La
consolidation des processus politiques à l’intérieur de chaque pays est, certainement,
une précondition importante pour le succès de toute initiative au niveau
régionale.
Et pourtant, il faut à mon
avis dès maintenant réfléchir sur les
moyens de tirer profit de ce momentum positif dans la région du Maghreb, et
essayer d’élaborer des visions ambitieuses pour développer soit les relations
entre les pays du Maghreb, soit les relations entre cette région et
l’Europe : une vision qui pourrait répondre aux attentes des peuples de la
région et promouvoir un véritable rapprochement entre les deux rives de la
Méditerranée visant à renforcer réciproquement leur cohésion dans un contexte
inclusif et intégré.
L’EXPERIENCE EUROPEENNE, LA
GLOBALISATION ET LA CREATION D’UN « NOUVEAU ORDRE » ECONOMIQUE
MAGHREBIN
Nous sommes partis dans l’Europe
occidentale de l’intégration économique, car nous pensions que cette
intégration nous aurait permis d’achever dans le futur l’intégration politique. La
globalisation et l’interdépendance économique ont rendu la coopération et
l’intégration économique une nécessité inéluctable. Aucun Etat ne peut aujourd’hui aborder seul les
problèmes de la croissance économique et de la compétitivité. Et à ce propos,
on peut tirer leçon de l’actuelle crise de l’Eurozone. On a du mal a surmonter
cette crise car, malgré les progrès faits avec l’Acte Unique et la monnaie
commune, les économies européennes ne sont pas encore suffisamment intégrées.
Et ce « déficit d’intégration » crée vulnérabilité face aux marchés
financières et limite les opportunités de croissance économique. Le
paradigme est donc complètement changé. Pour résoudre les problèmes
économiques l’Etat national ne suffit pas : on peut aborder ces problèmes
seulement dans une logique d’intégration et de partage de souveraineté. Les
résultats du Conseil Européen de jeudi 28 Juin sont très encourageants dans
cette direction.
Je
crois qu’il faudrait partir de ce changement de paradigme même ici dans le Maghreb . Afin de réaliser une nouvelle vision
régionale «Maghreb – led» on doit avant tout
avancer sur le plan de l’intégration économique. Croissance et
développement demeurent les priorités fondamentales de toute société. La relance de la dimension économique de l’Union pour
le Maghreb Arabe (UMA) représente donc une condition nécessaire pour renforcer
la croissance dans la région et donner un nouvel élan à la compétitivité de vos
économies.
Vous
le savez mieux que moi: la faiblesse des
relations commerciales inter maghrébines a été jusqu’à aujourd’hui un véritable
handicap pour la croissance dans la région. La plupart du commerce des pays
du Maghreb aujourd’hui se dirige vers l’Europe, alors que le commerce vers les
autres pays de la région est négligeable. Seulement le 3% de l’export algérien
se dirige vers les pays du Maghreb. La situation est presque la même dans le
cas du Maroc et de la Libye. La Tunisie représente une exception (11%). Ce
déficit d’intégration régionale et la « dépendance » excessive du
commerce avec l’Europe a malheureusement rendu le Maghreb plus vulnérable en
face de la crise de croissance de l’Eurozone.
J’en suis convaincu : la
promotion d’une économie maghrébine plus intégrée, l’intensification des
échanges commerciaux et des investissements intermaghrébins, une majeure et
progressive convergence des économies pourraient devenir le véritable
« game changer» pour le futur économique du Maghreb. L’intégration
attire plus d’investissements étrangers et peut générer les capitaux
nécessaires pour la construction d’infrastructures qui, à la fois , renforcent davantage
l’intégration économique et créent d’ultérieurs opportunités économiques.
La réunion ministérielle de
l’UMA de Rabat de février a déjà fixé des
objectifs très importants pour relancer l’intégration régionale au Maghreb .
Je
crois que en poursuivant ces objectives d’une façon concrète on peut poser les
bases pour créer un «nouvel ordre économique maghrébin». Je suis convaincu
que une majeure intégration régionale peut aider à aborder d’une façon plus
efficace les problèmes de la jeunesse liés au chômage. Le problème de l’emploi
constitue une des préoccupations majeures, et pas seulement au Maghreb … Il ne faut pas oublier que les jeunes et le
manque d’opportunités ont joué un rôle dans les révoltes arabes. Donc,
plus d’intégration économique régionale pourrait signifier même plus de stabilité
sociale. Je pense aussi que au – delà des gouvernements et des parlements il
faudrait activement engager les jeunes, les acteurs économiques et la société
civile dans ce projet d’intégration régionale.
UNE PLUS ETROITE INTEGRATION ENTRE
L’UNION EUROPEENNE ET L’ITALIE
Le
processus d’intégration intermaghrébine peut et doit marcher du même pas avec
une majeure intégration entre l’Union Européenne et l’Union maghrébine (UMA).
Je crois qu’il faut être ambitieux. Le moment positif dans la région du Maghreb, d’un
côté, et la logique de l’intégration dictée par la crise économique globale, de
l’autre, nous donnent aujourd’hui une opportunité historique pour réaliser un
saut qualitatif dans les relations entre l’Europe et le Maghreb.
Il faudrait envisager à mon avis la
création d’espaces communs entre l’Union européenne et le Maghreb (UMA) : un espace économique commun entre les deux
zones (au delà donc des accords bilatéraux de libre échange existant ou en
train d’être négociés entre chaque pays et l’UE), un espace humain commun (qui,
à partir des « accords de mobilité » qui sont en cours de négociation
avec chaque pays pourraient aboutir, progressivement, à une « plus
possible libre » circulation des personnes avec une politique européenne
plus ouverte sur les visas; un espace culturel commun, avec un programme
ambitieux d’initiatives pour améliorer la connaissance réciproque, intensifier
les échanges entre les universités, les sociétés civiles, le monde de l’art et
de la culture; un espace sécuritaire, dans lequel les pays européennes et
maghrébins puissent partager leur stratégies et leur instruments pour lutter
contre les menaces communes, voir le terrorisme, la piraterie, les trafics
illégaux.
On
pourrait donner un chapeau politique à ce projet des espaces communs avec la
structuration des relations institutionnelles entre l’UE et l’UMA, à travers des
Sommets annuels et des réunions régulières au niveau des Ministres des affaires
étrangères.
Je crois que le format du
« 5+5 », dans lequel l’Italie joue un rôle essentiel, peut donner une
impulsion décisive à l’intégration entre l’UE et l’UMA. Le « 5+5 » peut devenir le véritable
«noyau dur» du rapprochement antre l’Europe et le Maghreb. Celle-ci devrait
devenir de plus en plus sa vraie «mission».
Pubblicato da Lucrezia Pagano
il giorno 10.7.12. per la sezione
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